vendredi 24 mai 2013

Shiva


Shiva le destructeur? 

Il existe une différence entre avoir un avis sur un sujet, et connaître un sujet. A force de discuter de certains sujets de façon purement intellectuelle, on finit par attribuer à des symboles
des sens qui ont plus un rapport avec nos fantasmes et nos projections mentales plutôt que sur une connaissance profonde de la sagesse incarnée par le symbole.
Par exemple, deux divinités sont très mal comprises : Shiva et Kali.
Shiva est appelé le destructeur. Or, l’étymologie de Shiva signifie « auspicieux ». Tout cycle de vie a une naissance, une vie, et une transformation, c’est à dire une éclosion de sa vie sur un autre plan.
L’aspect transformateur, associé à l’énergie, car l’énergie transforme, est attribué à Shiva. Il est cette force de vie, cette énergie, cette intensité qui fait se mouvoir le monde, la poussant sur le sentier de l’évolution, de la perfection, de l’ennoblissement. C’est cette énergie qui fait se mouvoir une graine en arbre. Elle est l’opposée extrême à la stagnation : elle est vie, énergie, nature, force, évolution, passion, intensité… le serpent autour de son cou montre la maîtrise de l’énergie, et sa peau de bête sa maîtrise des instincts et de la force animale. Il boit de la coupe du poison qu’il transforme en remède, en ce sens il est aussi le transformateur du poison en nectar. Il se montre comme maitre shaman, conjurateur, yogi et maitre de l’énergie. L’énergie étant toujours mouvante, il s’oppose à la mort qui est la fixité. Il met fin aux limites, surtout intérieur, issus d’une identification de la conscience à la personnalité, ouvrant le chemin vers la réalisation que l’Univers réside en l’homme, et que son intériorité spirituelle est un soleil dont les dimensions ne se laissent pas mesurer.
Si il est destructeur, c’est le destructeur de la stagnation et de l’ignorance. Plutôt que destructeur, il est transformateur. Il est un grand oui à la vie, en libérant de l’emprise mental rigidifiant la nature toujours mouvante. Il est cause de paix, et se manifestant en Hanuman, il nous montre l’exemple de l’excellence, et la soumission de la conscience au principe divin régissant tous les mondes, offrant liberté absolue et rétablissement de la royauté intérieure.
Et Kali, dont la signification indique entre autre « enlever les ténèbres », est l’énergie de Shiva, son coeur et sa bouche. Elle est sa Shakti. Elle est la nature, la grand nature infinie, belle, infiniment douce et aussi terriblement puissante, d’une beauté captivante ou viennent se perdre toutes les dualités dans une image à la profondeur abyssale. Son colliers de cranes montrent sa suprématie sur ce qui est inférieur, qu’elle contrôle : ce sont aussi nos masques de noirceur, nos personnalités sombrent qu’elle tranche et dont le sang, l’énergie est réinvestie dans la vie, renouvelée, libérée de sa prison. Ses mains tranchés représentent les capacités du négatifs : elle empêche des choses négatives d’agir, elle protège. Et le sang coulant de ses trophées est l’énergie de la passion déviée, détournée qui est libéré afin de fertiliser notre terre intérieur, faisant jaillir en nous la vie véritable.
Elle enlève les ténèbres, réveille le grand Roi, le tire de son sommeil, l’emplissant d’énergie. Cela est la cause de la fin de la tendance mégalomaniaque qui nous gonfle de suffisance et de la tendance serpillère qui nous insectifie.
Elle foudroie la colère et la passion détournée qui nous rend aveugle et sont les racines de tant de souffrance. Elle apporte la paix tout en étant la kundalini. Sa danse est la danse de la nature, éternellement mouvante. Elle nous rend ivre d’amour, divinement passionnée, offre le don de l’efficacité, fruit de la sagesse, et se régale du sacrifices de nos tendances bestiales au profit de notre nature angélique, ou tout simplement humaine véritable.
Elle danse sur Shiva, qui la contemple. Loin d’être inactif, ils sont uns. Conscience et énergie, dans une même danse, font se mouvoir l’atome et les planètes, et se déployer la vie.
Elle porte la tête tranchée du grand égoïste, l’Hérode intérieur qui cherche à tuer en nous l’enfant Divin et faire tourner tous les mondes autour de nos délires égoïstes. De ce fait, le désintéressement se fait plus proche, intention rendant nos actes spirituels.
Alors, Shiva destructeur ? Au chercheur spirituel, on dira transformateur. Quand même, propitier le « destructeur », quel bizarrerie. Honorer un visage du Père céleste dans sa forme de maître de l’énergie, transformateur, c’est quand même autre chose.
Kali, destructrice ? Plutôt énergie suprême, mystère du féminin, libératrice des ténèbres intérieur, cause d’efficacité, de sagesse qui nous libère de nos entraves intérieur. Elle accroit l’énergie tout en libérant de ses déviances, nous faisant un canal pour sa montée.
Autant les symboles porte une sagesse millénaire, autant il faut faire l’effort de la chercher et de s’en imprégner. Le symbole devient alors vivant et ouvre à une richesse intérieur qui conduit au Merveilleux.